Les orphelins...

Le 27/04/2024 0

Jour de courses hippiques à Pempoul

C'est par un ciel azuré et une chaude atmosphère que vous descendrez aujourd'hui à la gare de Saint-Pol de Léon. Vous entrerez en ville par une rue pavoisée, au son d'une musique retentissante. Vous y trouverez tout le peuple en liesse.

 Et si j'en juge par les menus que s'apprêtent à vous servir les restaurateurs, vous serez bien traités. Ceux qui doivent être les hôtes de personnes privées verront leur repas agrémenté par la douceur de l'amitié ou la joie de la famille. Oui, tout le monde sera franchement accueilli et tout le monde sera en fête.

Je me trompe cependant. La-bas, sur la route du champ de courses, au tournant de la rue des Minimes, dans une maisou aux murs d une solidité douteuse, 27 orphelins placés sous la protection de saint Vincent de Paul à la pauvre niche de bois blanc, vous regarderont passer avec une curiosité sans amertume.

 Ils sont de chez vous, de chez moi. On ne leur demande pas d'où ils viennent ; on les reçoit, tant qu'il y a de la place.

Cette maison hospitalière, ils la doivent à une vieille demoiselle dont les parents, jadis, dans nos grands ports et dans nos possessions d'outremer, luttèrent avec succès pour le rayonnement de notre commerce extérieur.
Leur pain quotidien, leur instruction, leur éducation, tout le présent, à une autre demoiselle qui porte un nom justement honoré dans notre marine nationale. Elle a tout sacrifié : situation, jeunesse, brillant avenir, au soulagement de ces déshérités. Sa fortune, hélas ! n'égale pas son grand coeur...

Quand je me souviens que, cet hiver, ces pauvres petits, dont on ignorait le véritable sort, en étaient réduits à mendier quelques pommes de terre et des fagots pour les cuire,  ne puis je faire appel à votre générosité, sans qu'on m'accuse de jeter une noie triste sur l'éclat de cette fête ?

Aussi bien les courses seront belles à Penpoul, vous secouerez l'obsédante vision do toute misère. Mais commencez la journée par une bonne action, en fixant un regard attendri sur le coin de la rue des Minimes.

Vingt-sept petits garçons vous béniront. Leur bienfaitrice priera pour vous.

La Dépêche de Brest, 29 juin 1902.

 

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