L'Horn vue de Milin an Eskop

dit aussi moulin de Kerautret

Par Laurent QUEVILLY.

L'histoire du Moulin-l'Evêque est indissociable de celle de son voisinage : les manoirs de Kerautret et de Kerhoant, le village de Sainte-Anne, sa chapelle et sa fontaine. Inventaire en plusieurs épisodes...

Le moulin de Kerautret est de longue date appelé aussi moulin de l'Evêque ou encore moulin-l'Evêque. En breton, l'orthographe varie : melin an Escop, milin an Eskop... On trouve aussi la forme de moulin Lescop.

Que notre moulin ait été propriété épiscopale ne fait aucun doute. Boithias et Le Vernhe1 : « De la même veine sont les moulins de Lescop, Milin-an-Escop ou Eskop ou, dans leur forme francisée, les moulins de l'Évêque qui peuplent la toponymie bretonne comme en Minihy-Tréguier, Saint-Georges-en-Plougasnou, Mériadec, Trédarzec, etc. Tous tirent leur nom de leur titulaire hiérarchique, en l’occurrence l'évêché ou plus généralement le clergé. »

La plus vieille représentation de Milin an Escop : le cadastre napoléonien de 1811. Il se situe en amont du Moulin Merrot, dépendant du manoir de Kerhoant.

On sait que nombre de seigneurs se démirent jadis de leurs moulins au profit de l'Eglise où en partagèrent avec elle les revenus. Mais pour le moulin qui nous préoccupe, ce serait plutôt l'évêque qui en fit don. Voici ce que révèlent les archives des titres et rentes de l'évêché de Léon classées sur ordre de son dernier dernier évêque par le sieur Duchatellier : le 27 août 1555, le seigneur évêque, Mgr de Chauvigné, cède à la Dame de Kerautret un moulin à eau situé sur la rivière de Glezon, nom alors de l'Horn, contre 25 livres de rente à prendre sur le manoir noble et les dépendances de Lanrivinec en Plougoulm. Pour liquider cette rente, le sieur de Kerautret, Christophe du Cosker cède à l'évêque, le 14 may 1562, le manoir noble et appartenances de Poulanguernic en Plougoulm2.

Ainsi, Milin an Eskop serait le nom primitif de notre moulin qui, au XVIe, prit pour seconde appellation Kerautret.

Ce que l'on sait des châtelains de Kerautret, c'est qu'ils disposaient d'une chapelle privative à l'intérieur de la cathédrale de Saint-Pol mais aussi de la chapelle Saint-Anne, à Plougoulm, dont ils étaient les principaux bienfaiteurs avec les seigneurs de Kerhoant. Les Kerautret furent les premiers seigneurs du manoir du même nom. Ils sont attestés en 1356. Puis vinrent les Nuz, 1448, les Traonélorn, 1481, les Cosquer, 1547, les Kerc'hoent en 16013, Kerc'hoent qui avaient alors quitté depuis des lustres le manoir voisin qui porte toujours leur nom. Ils sont encore attestés à Kerautret en 1727. Sous Napoléon, en 1811, manoir et métairie de Kerautret appartiennent à Mme du Vieux-Chatel, de Saint-Malo. Le domaine serait passé ensuite aux Penfentenyo.

Dans son histoire de Plougoulm, Cécile Grall4 affirme que le moulin de Kerautret date de 1526 et « appartenait à l'évêque de Léon ». On ne saura pas d'où lui vient cette certitude. Après la Révolution, ajoute-t-elle, le moulin-l'évêque ne fait plus parler de lui, « sinon pour désigner le village qui a gardé son nom ». Or, nous verrons qu'il restera longtemps en activité...

Deux aveux de 1611 et 1622 rendus par la marquise de Kerjean pour la seigneurie de Kerhoant nous révèlent qu'à cette époque le moulin porte déjà les deux appellations. On note en effet une parcelle sous le nom de « Liorzou etal Melin an Escop prés le Moulin Keraultret ».

En 1683, un notaire faisant l'inventaire de Kerhoant se rend au moulin Merrot qu'il dit situé  « au-dessus du ruisseau qui flue du moulin Lescop, dépendant de la maison de Kerautret5» Maître Lingen ne peut être plus clair : le moulin de l'évêque appartient donc en 1683 au seigneur de Kerautret qui n'est autre que François Toussaint de Kerhoënt, marquis de Coëtanfao, militaire alors engagé sur différents champs de bataille.

Le moulin de l'Evêque avant et après restauration...

 

De quel type était jadis le moulin de Kerautret ? Erudit, l'abbé Feutren pense qu'il a pu disposer à la fois d'une roue motrice horizontale située à l'intérieur même du bâtiment et d'une roue extérieure actionnant une autre meule et peut-être un blutoir à séparer la farine du son. Milin an Eskop appartenait en tout cas à une communauté d'intérêts – parfois divergents comme nous le verrons – celle des moulins de l'Horn. Ils étaient fort nombreux et, curieusement, aucune étude, aucune carte ne nous les présente avec précision. Voici la liste que nous avons tenté d'établir : LIRE

(A suivre)


SOURCES


1 Les moulins à mer et les anciens meuniers du littoral, Jean-Louis Boithias et Antoine Le Vernhe, Ed. Créer, 1989.

2 Folio 37 de l'inventaire consulté dans des archives privées par l'abbé Feunteun, recteur de Roscoff et retranscrit dans bulletin paroissial.

3 Châteaux et manoirs du canton de Saint-Pol-de-Léon, Jean-Yves Le Goff, Quimper, SEHA, 1988.

4 Plougoulm et son histoire, Cécile Grall, Imp. Cloitre, 1983.

5 Fonds et prix des maisons, terres et seigneuries dépendantes de Messire René Barbier, Seigneur de Kerjean, AD29, 77 J 3.

 

Date de dernière mise à jour : 25/05/2021

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