La fin du moulin de l'Evêque

Le 23 août 1920, Elie Bertevas et Joseph Saillour, propriétaires à Pontplaincoët, demandent une réglementation du moulin de Kerellec qui, accusent-ils, inonde continuellement leurs prairies. Le 25, la police des eaux inspecte l'Horn entre Kerhoant et Kerellec. Elle suit à première vue son cours naturel. « Quelques portions de prairies sont inondées, mais sur une surface relativement minime. » L'Administration ne se sent pas concernée par les querelles personnelles et décide qu'il n'y a pas lieu de réglementer. Les deux pétitionnaires insistent : « Du temps de l'ancien moulin de Kerellec, les prairies n'étaient presque jamais inondées. Sauf rares grandes pluies. Depuis son renouvellement, c'est sous les ans. Le dit moulin doit être relevé plus haut que l'ancien ainsi que le bord de son étang, ce qui lui permet de maintenir une charge d'eau qui inonde nos prairies. » Bref, la rivière aurait-elle besoin d'être curée ? « Le meunier de Kerellec, pour sa défense, dira que ce sera la cause. Mais non. L'année dernière, la rivière a été curée fin juillet enfin comme il fallait le faire et maintenant, il est vrai qu'elle en a besoin encore. Mais c'est forcer cela ca jamais il n'ouvre ses vannes pour le vidage de la rivière, alors toutes les saletés y restent, ce qui occasionne le bouchage de la rivière. Ainsi, nous coudrions qu'on impose un niveau d'eau au moulin de Kerellec pour faire cesser cet état de chose qui est très préjudiciables aux riverains. »

3 septembre 1920 : création à Landerneau du syndicat de la meunerie du Finistère. Au XIXe existait déjà une chambre syndicale des meuniers du Finistère.

Le moulin l'Evêque en 2001 bien avant restauration...

La famille Cabic est attestée au moulin l'Evêque en 1921. Yves-Marie est né en 1869 à Plounévez-Lochrist ainsi que son épouse Marie-Louise Boucher. Le couple a eu là-bas un premier enfant, Yves, en 1902. Puis est venu François Cabic, à Saint-Pol, en 1904, Denis, Françoise, Jean-Pierre...

Sans employés. Le moulin semble avoir cessé de tourner car ses occupants sont dits cultivateurs. 70 ans après sa création, l'usine et à serancer le lin est toujours active en 1921. C'est l'année où, en amont, ar Milin-Vein, seul moulin où l'on broyait le feldspath, devient une scierie. En septembre, es époux Kerguillec noient leur bébé dans l'Horn. Aux Assises, le père écope d'un an de prison avec sursis. En septembre toujours, Paul Menez, de la scierie de Richelet, Plougoulm, demande le curage de l'Horn depuis le moulin de Gamer-Soul jusqu'à la mer. Une opération qui n'a pas eu lieu depuis six ou sept ans. Mais au printemps suivant, le rivière est jugée en bon état. La raison en est une sécheresse exceptionnelle. François et Françoise Cabic n'apparaissent plus au recensement de 1926. Les parents restent donc là avec trois de leurs fils.

Bancs de vase, sables, pierres et plantes aquatiques provoquent l'inondation des prairies et des apports irréguliers aux moulins. Alors, le 23 juillet 1926, le préfet ordonne le curage de l'Horn depuis le moulin Gamer jusqu'à la mer entre le 1er août et le 30 septembre. « Chaque propriétaire enlèvera à ses frais selon les anciens règlements et usages locaux vases, sables et graviers et autres dépôts et arbres tombés ou accrus dans le lit du cours d'eau. Il ordonne également d'élaguer es branches basses et pendantes, de faucarder les herbes et joncs, faire disparaître les obstacles qui s'opposent au livre écoulement des eaux de manière à rétablir le lit dans ses vieux fonds et vieux bords.

Les usiniers auront les mêmes obligations le long des digues créées de main d'homme pour l'alimentation de leurs usines. Ils devront en outre retenir les eaux pendant que s'effectuera le curage des portions de ruisseau situées immédiatement en aval. »

Le 26 mai 1927, le conseil municipal de Plougoulm estime que le curage opéré l'année précédente « a fait le plus grand bien aux prairies tout en améliorant le débit de l'eau pour les moulins. » Du coup, il intervient pour que le préfet prenne un nouvel arrêté. Il est signé le 28 juin.

Yves, l'aîné des enfants Cabic, épousa une fille de Plougoulm, Françoise Pleyber. Elle lui donna François Cabic, en septembre 1930, né au Moulin-L'Evêque. Suivra Jean-Pierre en 1933.

1er décembre 1930 : « Par suite des pluies qui n'ont cessé de tomber avec une violence rare, les rivières débordent de leurs lits les prairies sont inondées. L'usine électrique, établie sur un affluent de la rivière l'Horn. et qui fournit l'électricité au bourg de Plouénan, est submergée, et le bourg a été privé de lumière toute la soirée de vendredi et hier matin samedi. »

Mai 1931 : décès de Marie-Louise Boucher, femme Cabic, 61 ans, au moulin.

Le 22 septembre 1932, Félicité Moysan, née au moulin l'Evêque, demeurant à celui de Kerellec, épouse le garagiste de Saint-Pol, Jean Madec. Repas de noce à l'hôtel du Commerce, bal du soir au restaurant Sévère, rue Cadiou. Henri Combot, l'horticulteur, a décoré la salle. A cette époque, François Moysan, lui aussi, se classe dans les concours de chevaux.

La presse locale annonce régulièrement la prise de belles truites dans l'Horn. Mais en avril 1933, à Pont-d'Argent, Plouvorn, c'est une loutre de 9 kg qui est capturée.

Septembre 34 : en amont, au moulin du Stang, on repêche le cadavre d'une journalière de 52 ans, Marie Séité, épouse Elard. Une chute sans doute due à la boisson... En octobre, le préfet ordonne un nouveau curage de l'Horn sur une portion de 25 km entre la limite amont de Plougourvest et la grève de Kerbrat-Plougoulm.

1935 : Denis Cabic, du Moulin-L'Evêque, épouse Marie Renée Rosec, cultivatrice à Kervaou, Cléder.

1936 : Yves Cabic est devenu le chef. Son père, Yves-Marie, est toujours cultivateur. Son frère, Jean-Pierre, aussi... En septembre, Jean-Claude Moysan, minotier à Kerellec, né à au moulin Lévêque, épouse Anne-Marie Roué, de Létiez.

En 1940, le moulin de Sinan bouillonnait toujours. Les Boulch y fabriquaient du pain.

Four et moulin ont été détruits à Sinan...

Durant un séjour en Bretagne, en 1954, le naturaliste Bourrelly découvrit deux stations de l'algue crustacée Hildenbrandia jusque-là non répertoriée. « La première est située à 3 km. de l’Ouest de Saint-Pol-de-Léon, dans le petit ruisseau de l’Horn. Sous un viaduc, dans un petit rapide du ruisseau se développe une végétation luxuriante de Lemanea fluviatilis accompagnée aux endroits plus éclairés de touffes de Cladophora glomerata. C’est à cet endroit que croissent sur le fond entre les tapis de Pseudo chantransia chalybea, quelques thalles rouge sombre d'Hildenbrandia. »

1964 : mise en service du château d'eau de Plouénan.

1971 : création du Syndicat mixte de production et de transport d’eau potable de l’Horn. A cette époque, la famille Cabic rachète les bâtiment aux Barbier de Lescoët.

En 1984, l'inventaire du patrimoine établit un dossier sur Milin-an-Eskop. « Moulin et logis portant les dates 1700 et 1719 et une inscription. Maison à apothis-taol probablement 1ère moitié XIXe siècle. Bâtiment à deux fours, peut-être ancienne boulangerie, situé sur l'autre côté de la rivière de l'Horn, commune de Plougoulm. »

1994 : restauration du moulin de Kerellec.

Clin d'œil de l'Histoire : après avoir appartenu au comte de Langle, héritier des Barbier de Lescoët puis à la famille Cabic, le moulin l'Evêque est de nouveau lié au manoir de Kerhoant.

Laurent QUEVILLY.

 

Date de dernière mise à jour : 28/06/2021

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