LE 14 juillet 90 à Saint-Pol

Le 19/10/2023 0

Le 5 juillet 1790, le conseil général de Saint-Pol décidait de faire élever sur la Grand' Place un autel à la patrie « avec toute la décence possible pour le jour mémorable et si désiré du 14 » et d'y faire célébrer une messe par le Révérend Père Turquet, supérieur des Minimes, aumônier de la municipalité et de la garde nationale.

A la suite de cette cérémonie religieuse, le conseil devait renouveler son serment d'être fidèle à la nation, à la loi, au roi. Etaient nommés commissaires de la fête : Le Gall de Kerven, procureur de la commune; Figuières et Berdélo, officiers municipaux; Michel du Coin, Le Guével et Bolloré, notables.

Sollicité de donner son agrément à la célébration de la messe, Mgr de La Marche, évêque de Léon, envoyait au conseil une lettre signifiant son refus formel, refus motivé par les critiques qu'il faisait à la constitution civile du clergé (lettre du 11 juillet 1790).

Le lendemain 12 juillet, le maire. Le Hir, convoque le conseil à 8 heures du matin, pour délibérer sur les mesures à prendre. L'assemblée est d'avis d'envoyer au R.P. Turquet un « réquisitoire » pour qu'il célèbre la messe le 14 sur l'autel de la patrie, comme il en a déjà pris l'engagement. Mais le supérieur des Minimes doit s'excuser en communiquant au conseil la lettre qu'il vient de recevoir de l'évêque :

« On m'a dit, mon Révérend Père, que vous vous proposiez de dire la messe à l'autel que MM. de la municipalité font dresser sur la place. Pour éviter toute erreur de votre part, je crois devoir vous prévenir que Je n'ai pas pensé pouvoir donner la permission d'y célébrer, et, qu'en conséquence, aucun prêtre ne pourrait y dire la messe sans recourir à la dispense portée par les statuts du diocèse. Instruit soit par moi, soit par MM, de la municipalité que j'ai refusé cette permission, je suis bien assuré que vous vous excuserez de remplir les engagements conditionnels que vous pourriez avoir pris.

« Je suis, avec un sincère attachement, mon Révérend Père, votre très humble et très obéissant serviteur.

J.-Fr., év. de Léon ».

Le 13 juillet, à 8 heures du soir, la municipalité est de. nouveau convoquée. On décide d'envoyer sur le champ une invitation au R. P. Paulier, prieur de Saint-Fiacre, près de Morlaix (évêché de Tréguier), de venir remplacer son confrère.

Le R.P. Paulier accepte et arrive à Saint-Pol le 14 juillet vers 9 heures du matin. Le temps n'est pas des plus beaux, le vent souffle avec force. Le R. P. Paulier fait observer qu'il ne pourra peut-être pas officier sur la place. A sa demande, le conseil envoie vers le sieur Troërin, grand chantre de la cathédrale, une dêputation de trois officiers municipaux, décorés de leur écharpe et précédés d'un héraut, afin d'obtenir l'agrément du chapitre pour la célébration de la messe dans la cathédrale. Le sieur Troërin répond qu'il consultera le chapitre.
Comme à 11 heures aucune réponse n'est encore venue, l'assemblée municipale dépêche un nouveau hérault. On lui fait savoir que l'évêque a répondu « qu'il n'était pas décent qu'on fût allé de l'autel au théâtre ».
Il ne reste plus au conseil municipal qu'à faire prendre toutes les précautions « pour célébrer, sans risque de l'enlèvement de l'hostie, le saint sacrifice de la messe ».

Vers 11 h. 30, le conseil général, accompagné d'une garde d'honneur, de l'aumônier, du père prieur des Minimes et des autres religieux de sa communauté, se rendent sur la Grand'Place où a été dressé l'autel de la patrie, qui est décrit comme suit :

« Un autel à la romaine, décoré de quatre colonnes avec bases et chapiteaux, couvert d'un dôme surmonté dans son endroit le plus élevé d'une pyramide avec une couronne garnie de lauriers et de fleurs, les colonnes garnies également, ainsi que les espaces, les quatre ouvertures de l'édifice surmontées d'arcs de triomphe garnis de lauriers et les colonnes de pyramides d'une même hauteur, aussi garnies de lauriers ».

L'autel est encadré du carré des troupes de la garde nationale (lieutenant-colonel de Mézangeau) et des détachements des régiments de Normandie et de Beauce (commandant Dure), drapeaux en tête.
La messe est annoncée par un roulement de tambours, puis ensuite l'officiant, le R.P. Paulier prononce un sermon, dans lequel il s'attache à montrer les avantages de la nouelle constitution, exhorte les pères à élever leurs enfants dans des sentiments d'attachement à leur religion et à leur inspirer de bonne heure les sentiments de dévouement à la patrie, au roi, à leurs concitoyens.

Le maire prononce un autre discours, qu'il termine en prêtant le serment fédératif. Prêtent ensuite le serment : l'officiant et les religieux qui l'accompagnent, les officiers municipaux, les notaires, le procureur de la commune, les officiers, les troupes, les « écoliers » et une foule de citoyens.

L'officiant entonne le « Te Deum » en action de grâce de l'heureuse fédération qui unit à jamais tous les Français.

La fête se termine par une salve de 21 coups de canon et dans l'allégresse générale.

 

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